Andrea Sham
Dans sa maison atelier entourée de verdure, Andréa crée des gâteaux sans gluten et vegan pour plusieurs restaurants parisiens (Jaja Le Tricycle, Abattoir Végétal…). Non seulement, ses gâteaux sont délicieux, sans gluten et vegan, ils aussi magnifiques ! Souvent ornés de quelques touches florales, ses gâteaux voyagent désormais dans toute la France grâce aux livraisons Chronofresh (avis aux amateurs). On a enfin trouvé le temps de se retrouver une matinée de juillet, pour déguster un généreux gâteau au chocolat et des tartines maisonlouno. Je suis ravie de partager avec vous son parcours bien rempli, comment elle s’est retrouvé à faire des gâteaux il y a 2-3 ans, la si forte inspiration qu’elle tient de la nature environnante et de rares photos d’elle ! :)
Parcours
Quel est ton parcours jusque-là et comment s'est initiée ton aventure dans la cuisine, et plus particulièrement la pâtisserie sans gluten et végétalienne ?
J’ai un parcours qui a été plutôt mouvementé jusqu’à présent. Je suis née au Venezuela d’un père chinois et d’une mère portugaise et nous sommes venus vivre en France lorsque j’avais 11 ans. Cela n’a pas été sans conséquences dans mon parcours – qu’il soit scolaire ou personnel - que j’ai vécu avec difficulté. Au départ je souhaitais faire des études d’art et de musique, cela n’ayant pas été possible dû aux aléas de la vie, j’ai suivi des cours et des formations très différentes : cinéma, chapellerie, anthropologie, naturopathie… sans parler des nombreux ateliers auxquels je me suis inscrite : céramique, couture, ou encore des jobs dans l’agriculture.
Je n’avais jamais envisagé de créer ma propre entreprise mais le gérant de Detox Delight, chez qui j’avais fait un CDD il y a trois ans, cherchait à qui acheter des gâteaux vegans bio et sans gluten en B2B. Il avait goûté mes gâteaux et avait beaucoup apprécié et a insisté pour que j’en produise pour son établissement.
Je pensais faire quelques gâteaux par semaine pendant mes heures de travail mais ce dernier a insisté pour que je crée ma propre structure et que je lui vende les gâteaux.
Pour moi c’était la panique au début car je ne m’en sentais pas capable : je n’y connaissais rien au monde de l’entrepreunariat ni au monde de la cuisine professionnellement parlant, j’étais seule et j’avais un gros problème d’auto-estime personnelle, avec beaucoup de sentiments d’incompétence et une très mauvaise image de moi-même, de ma valeur et de ma place dans ce monde.
Malgré la panique et l’inconfort que cela générait, je savais que c’était ma chance et que je devais me lancer. J’ai interprété cet événement comme une invitation à me réaliser.
On peut dire que je l’ai plutôt bien senti car d’autres clients sont venus peu de temps après de manière très étonnante et fluide, certains avec la même demande alors qu’ils n’étaient pas au courant du fait que je montais l’entreprise. Depuis je vis de mon activité et je travaille avec plusieurs restaurants sur Paris.
Créativité
Tu crées régulièrement de nombreuses nouvelles recettes. Comment l’idée d’un gâteau ou plat te vient-elle ?
Je réfléchis beaucoup en termes de couleurs, de formes et de composition du plat, mais j’adore les plats simples et traditionnels.
J’ai toujours été très curieuse et fascinée par ce que les gens mangent chez eux - mon côté ethnologue. Pour moi goûter leur nourriture est une manière de les rencontrer, de m’unir à eux. Et même si je suis très inspirée par une cuisine plus brute et naturelle, j’adore aussi découvrir leurs produits de base, ceux que tous les foyers ont à la maison et qui ne sont pas forcément d’origine locale ni fait maison ni considérés comme sains.
J’aime découvrir et explorer et je passe d’un sujet à un autre, en ce moment je suis très curieuse de la cuisine sauvage de forêt et j’explore les aliments que je peux cueillir près de chez moi dans la forêt de Meudon. De fil en aiguille cela m’a amené à avoir des discussions autour de la cuisine russe car ces derniers sont férus de cueillette et de cuisine sauvage, et j’ai entendu parler de plats dont la préparation est incroyablement subtile et poétique, et j’ai hâte de les reproduire !
Au-delà des recettes, il y a une véritable expression artistique à travers tes pâtisseries. Comment l’inspiration te vient-elle ? Quels sont les univers qui t'inspirent ?
Je suis touchée par tout ce qui est de l’ordre du symbolisme, de l’alchimie, de la magie. La musique a une grande importance également dans ma vie, je ne peux passer une journée sans en écouter, elle me porte et m’inspire, me donne de l’énergie.
Plus concrètement ce qui m’inspire peut être une image, une musique, un ressenti… J’ai toujours regardé beaucoup d’images qui n’avaient souvent rien à voir avec la nourriture : c’étaient plutôt des dessins et des peintures, des couleurs, des textures et des formes. Parfois je vois un dessin ou une forme et j’ai tout de suite envie de les reproduire sur un gâteau ou un plat. D’autres fois j’ai juste une idée qui me vient sans qu’il y ait de lien consciemment direct avec quelque chose, vu de l’extérieur, et qui ne me quitte pas jusqu’à ce que je la réalise.
En fait, je suis particulièrement touchée par les états intérieurs, les ressentis, les expériences. Ce n’est pas seulement gustatif et visuel mais cela va au delà. Je me sens souvent émerveillée devant tout ce que la nature nous offre et c’est cet émerveillement là que j’essaie de partager au monde au travers de mes plats et des photos que j’en fais.
Food
Que représente la cuisine pour toi ?
La cuisine est pour moi un medium de réalisation artistique et spirituelle, aujourd’hui elle est aussi une source de stress de par le travail que cela représente et au vu des quantités que je produis de manière hebdomadaire. Mais au départ c’est un espace de détente, de concentration et d’émerveillement.
Qui a eu un impact sur ta manière de cuisiner aujourd’hui ?
Ma famille et le pays où j’ai passé mon enfance (Vénézuéla), dans lequel j’ai connu la cuisine qui se prépare en famille et se mange avec les voisins. La street food également. Je me souviens encore des voisins qui vendaient des glaces maison que l’on s’empressait d’aller chercher à leur fenêtre - moi-même avec ma mère on en vendait parfois, ainsi que des gâteaux et des boissons fluos :). Les fêtes d’anniversaire avec pleins de petits bouts à grignoter super bons, des pinatas et des grands gâteaux assortis.
La France et l’Italie ont une influence évidente, car j’y ai connu la joie des dîners entre amis, que ce soit dans des salons parisiens ou berlinois (ville où j’ai vécu et où j’ai beaucoup partagé avec des italiens et des américains) ou dans des chaleureuses maisons de campagne au coin du feu.
Et enfin j’ai eu la chance de rencontrer un chef cuisinier japonais et qui est devenu un ami. Il m’a fait découvrir cette dimension précieuse chère à la culture japonaise, où chaque étape, de la préparation jusqu’au service, est exécutée avec délicatesse et révérence.
3 cantines/ cafés où tu aimes te rendre à Paris ?
Je vais beaucoup moins aux cafés depuis que je n’habite plus Paris centre, mais j’aime bien aller travailler chez Ten bells rue Bréguet ; j’aime bien Shakespeare et Cie et je rêve souvent du burger portobello de PNY.
As-tu un petit déjeuner de prédilection ?
Je n’ai pas vraiment de petit déjeuner de prédilection, mais souvent je commence par une boisson chaude ou froide (en ce moment café, matcha ou citronnade maison) et le petit déjeuner vient longtemps après.
Parfois ce sont des œufs avec des tartines, parfois granola avec yaourt et fruits, d’autres fois avocado toast ou smoothie, et puis parfois juste un bout de gâteau qui traîne…
Cela m’arrive aussi d’avoir très envie d’un petit déjeuner à l’asiatique, c’est à dire un repas complet avec riz, légumes, algues, tofu, bouillon…
En fait mes petits déjeuners sont souvent aussi le déjeuner.
Vie intérieure
As-tu des routines ou exercices qui te permettent de lutter contre le stress et maintenir ton énergie ?
J’ai la chance d’avoir une thérapeute qui est très disponible pour moi et qui m’aide à y voir plus clair quand c’est confus et difficile.
J’écoute beaucoup les enseignements des maîtres, que j’essaie tant bien que mal d’appliquer dans ma vie de tous les jours.
J’ai aussi fait le choix de m’installer dans une ville avec beaucoup d’espaces verts et naturels car c’est vital pour moi.
De la méditation, un peu d’activité physique, ranger la maison, des films avec des happy ending… :)
As-tu des mantras ou courtes phrases que tu répètes régulièrement, qui te renforcent et t'aident à garder le cap ?
J’ai le mantra qui m’a été donné par mon maître spirituel mais qui ne peut pas être partagé, je fais aussi souvent du ho’oponopono et j’essaie le plus possible d’avoir des intentions belles et sincères, celle de faire de mon mieux par exemple.
Un film qui t'aide ou t’a aidé dans ton épanouissement personnel ?
Working Girl, 1988 avec Mélanie Griffith et Harisson Ford . J’adore :)
Andréa Sham a été photographiée chez elle à Meudon par Louise Skadhauge.